top of page

Prélever et inoculer les mycorhizes pour son contexte


Pour cultiver vos propres inoculants de champignons mycorhiziens, vous pouvez commencer par des spores, des fragments d'hyphes ou des fragments de racines colonisées.


Les grandes spores de champignons mycorhiziens arbusculaires, d'une taille de 30 à 500 micromètres, sont visibles au microscope ou à l'aide d'une loupe et sont par ailleurs faciles à collecter.


Ces champignons peuvent se reproduire à partir de spores ou de vésicules nées à l'intérieur d'une racine de plante colonisée. Lorsque la racine meurt, les vésicules germent et développent des hyphes, exactement comme des spores.

DES FEMMES, PIONNIÈRES DES MYCORHIZES EN LABORATOIRE

En tant que symbiotes obligatoires, les champignons mycorhiziens ne peuvent pas être cultivés sans une racine hôte ou ses exsudats. Ce qui rend la tâche en laboratoire non aisée.

En 1953, Barbara Mosse, de la station expérimentale Rothamsted à Harpenden UK, réussit la première culture de mycorhizes en laboratoire. Elle isola et inocula des plants de fraisiers avec un champignon désormais connu sous le nom de Funneliformis mosseae (en son honneur). Ce champignon fut également utilisé pour coloniser des pommiers, du blé, des graminées, des tomates, et de la laitue, faisant preuve qu'un seul champignon mycorhizien pouvait avoir une vaste gamme de plante hôte.


À cette époque, ils ne savaient pas s'il existait plus d'une sorte de champignon mycorhizien arbusculaire, jusqu'en 1955 où B. Mosse et ses collègues arrivent à en identifier d'autres.


En 1961, Victoria Barrett, de l'université Auburn d'Alabama, annonce qu'elle avait réussi à isoler et cultiver des champignons mycorhiziens arbusculaires sur support de graines de chanvre. Elle l'a baptisé Rhizophagus.


Plusieurs champignons mycorhiziens portent le nom de chercheurs à qui nous devons ces découvertes et connaissances comme par exemple Trappe, Berch, Allen, Harley, Rayner, Schenck, Mosse, etc... Ces scientifiques ont fait des découvertes d'une portée immense et ils mériteraient davantage de reconnaissance pour les efforts qu'ils ont accomplis et les savoirs dont nous disposons maintenant pour penser et construire une agriculture plus juste et diversifiée, saine et résiliente.

RÉCOLTE DE PROGAGULES SUR LE TERRAIN

Il s'agit de glaner les propagules dans le sol en les récoltant en bordure de champ ou en lisière de bois. Il est essentiel de collecter le plus diversifié possible, aussi veillez à récolter plusieurs échantillons de sol en plusieurs zones.


Une fois votre trésor en main, mélanger les échantillons de collecte ensemble.


Il s'agit ensuite d'extraire les particules grossières comme les brindilles, les cailloux, et autres. Ce prélèvement doit contenir une population assez large et diverse de champignons mycorhiziens indigènes qui deviendront les inoculants.


Pour déterminer les champignons mycorhiziens que vous venez de prélever, vous pouvez envoyer des échantillons en laboratoire.

TAMISAGE HUMIDE DES SPORES

Utiliser une série de tamis de plus en plus fins pour isoler les spores du sol dans une solution. Il est possible de se procurer des tamis pour étude de sol auprès de fournisseur de laboratoire. Pour effectuer le tamisage des spores, il vous faudra un tamis de plusieurs ouvertures de mailles :

- 750 micromètres ;

- 250 micromètres ;

- 100 micromètres ;

- 50 micromètres.


La séparation par flottation est la dernière étape de ce procédé :

- Dans un solvant liquide comme de l'eau ou du glycérol ou encore du sucrose, les particules de sol dans le solvant sont suspendues à différents niveaux.

- Utiliser un gradient de densité pour mesurer les différentes densités des matériaux. Les spores fongiques sont plus lourdes que la plupart des autres matières organiques qui se trouvent dans le sol, mais tout de même moins lourdes que les minéraux.

COLORATION DES MYCORHIZES ARBUSCULAIRES POUR ÉTUDES AU MICROSCOPE

Même si le mycelium, les manchons racinaires et les fructifications de certaines ectomycorhizes sont visibles à l'oeil nu, il faut recourir à un microscope pour distinguer les mycorhizes arbusculaires.

Comme les pigments naturels des racines sont foncés, et empêchent de voir les champignons qui sont pour la plupart transparents, les pigments des racines doivent être éliminés puis appliquer une teinture qui adhère aux champignons, afin de les révéler sous la lentille du microscope.


Traditionnellement, les teintures utilisée en laboratoire sont très alcalines et donc dangereuse à manipuler pour des personnes non expérimentées et peu outillées.


Néanmoins, d'autres méthodes, moins dangereuses, peuvent être utilisées pour colorer et examiner les champignons mycorhiziens arbusculaires :

- Ramasser les racines fraîchement coupées et prélevées, les laver à l'eau claire ;

- Tremper les racines pendant 24h dans de l'eau dans un tube à essai ou autre récipient similaire ;

- Puis les racines baignent dans une solution, à part égale, d'eau et d'hydroxyde de potassium (KOH) dilué à 2,5% (bien moins agressif mais reste dangereux, à manipuler avec toutes les précautions -> suivre les indications présentes sur l'emballage) avec de l'eau à quantité égale.

- Préparer une teinture à base d'encre de Chine et de vinaigre, qui servira à colorer les racines dont les pigments auront été éliminés par ces différents bains ;

- Enfin, laisser 2 à 3 jours les racines dans du glycérol qui va éclaircir les racines et les champignons avant d'appliquer la teinture à l'encre de Chine.


Les procédés actuels sont complexes et représentent des risques, aussi le recours à des laboratoires pour identifier les champignons à partir de leur ARN ou ADN reste une solution sûre.

MÉTHODE DE PRODUCTION D'INOCULANTS DE L'INSTITUT RODALE

Son fondateur J.I. Rodale a largement été influencé par les techniques de culture des pionniers du jardinage biologique en Grande Bretagne, Eve Balfour et Albert Howard. Rodale désirait promouvoir un système holistique d'agriculture à la fois bienfaisant pour la santé humaine et respectueux de l'environnement. L'institut s'est engagé dans la recherche agricole, il a noué des partenariats avec des groupes privés et avec le Département de l'Agriculture Américain.


En 2010, les chercheurs de l'institut ont publié le "Système de production à la ferme d'inoculum de champignons arbusculaires", créé pour les agriculteurs et conçus pour éviter d'avoir recours à un équipement compliqué ou des matériaux onéreux et difficiles à trouver, les informations détaillées sont consultables sur le lien suivant : rodaleinstitute.org/science/articles/quick-and-easy-guide-on-farm-production-of-arbuscular-mycorrhizal-fungus-inoculum/


L'une des découvertes de l'étude porte sur les transferts de terre qui présentent un risque d'introduire des organismes potentiellement pathogènes, or si la plante hôte est différente de la plante de culture, le développement inopiné d'agents pathogènes est diminué.

RECETTE D'INOCULANTS MYCORHIZIENS ARBUSCULAIRES DE L'INSTITUT RODALE

Cette recette donne 16 sacs d'inoculants, qui permettent d'obtenir 5,66 ou 11,32 m2 de terre de rempotage inoculée, fonction du taux de dilution de l'inoculum par rapport au support (1 à 9 ou 1 à 19).

Ce processus demande 4 mois, temps de manipulation et de préparation et demande à commencer au début du printemps : les plantes hôtes sont tuées par le gel et les propagules fongiques passent l'hiver dans le mélange où elles se sont développées.

MATÉRIEL :

- Graines de Bahia - Paspalum notatum

- Terre de plein champ ou à défaut mélange de propagules issu du commerce

- Vermiculite

- Pots coniques en plastique

- Sable à gros grains

- Toile couvre sol

- Sacs de croissance noirs de 2,5 L

- Compost

MÉTHODE :

  1. 4 mois avant la dernière gelée annoncée, faire germer l'herbe de Bahia ;

  2. 3 mois avant la dernière gelée annoncée, transplanter les jeunes pousses de Bahia dans des pots coniques en plastique remplis avec un mélange de terre et de sable (1 pour 3). Le pot conique fournit suffisamment d'espace pour que les racines puissent se développer ;

  3. Dès que possible après la dernière gelée, préparer la zone de production des inoculants en couvrant le sol avec une toile de paillage couvre-sol. Préparer les sacs de croissance en les remplissant au 3/4 avec un mélange de compost et de vermiculite, basé sur un ratio de 1 ) 4 de compost de jardin. Transplanter 4 jeunes pousses dans chaque sac ;

  4. Pendant la période de croissance, désherber et arroser les plantes dans les sacs chaque fois que c'est nécessaire. Les mycorhizes vont se développer au fur et à mesure que les plantes poussent. En hiver, le gel va uer les herbes de Bahia et les mycorhizes vont naturellement passer l'hiver dans les sacs, à l'abri.

  5. Au printemps suivant, récolter les inoculants, éliminer les plantes mortes, secouer la terre de culture qui adhère à la boule racinaire dans un grand récipient. Ce mélange contient les spores des mycorhizes et les hyphes chargés de vésicules. Couper les racines en petits segments d'environ 1cm puis mélanger l'inoculum avec la terre de transplantation. Pour des pots bas, respecter un rapport de 1 pour 9 pour le mélange inoculum et terre, pour des pots plus grands le rapport approprié est de 1 pour 19.

LES SUPPORTS DE CULTURE

Le compost pur, le sable pur, la perlite et la vermiculite sont tous de bons supports pour les mycorhizes, mais présentent de faibles résultats lorsqu'ils sont utilisés seuls. Soit par la pauvreté en minéraux du substrat, soit à l'inverse, lorsque le substrat est trop riche en azote et en phosphore, comme le compost par exemple.


Le support qui présente les meilleurs résultats se trouve être un compost riche en azote, pauvre en phosphore et modéré en potassium. Le mélange pertinent semble être un compost dilué à 1 pour 4, avec un mélange des autres supports cités au dessus. Bien sûr, les résultats varient en fonction des champignons mycorhiziens utilisés et les supports de dilution disponibles ou choisis.


L'étude a démontré que le mélange obtenu avec 1 part de compost de jardin et 4 parts de vermiculite produit une moyenne de 30 spores / m2. Les propagules complémentaires proviennent des racines colonisées et les vésicules présentes peuvent également développer des mycorhizes.


Cette méthode d'inoculat peut être adaptés à des sacs plus petits et des plantes hôtes différentes comme le seigle, la fétuque, le maïs et d'autres graminées qui fournissent des spores, des propagules et des racines.

CULTURE D'INOCULANTS SUR LE TERRAIN

Pour cultiver votre propre inoculum mycorhizien, il vous suffit de choisir n'importe quel terreau commercial qui ne contient pas d'engrais ou de fumiers ajoutés et de le stériliser. Par un passage en auto-clave ou au four pendant 1h30 à 120°C. Au bout d'une semaine ou 2, mélanger 1 part de terre prélevée sur le terrain avec 3 parts de terre stérilisée. Il est tout à fait possible de mélanger la terre stérilisée avec un mélange issu du commerce afin d'éviter la présence et le développement d'agent pathogène.


Le meilleur site de collecte de terre et de propagule est un champ qui a été cultivé peu de temps avant ou encore en culture et qui offre un sol riche en matière organique.


Plus on ajoute dans le mélange de cette terre où la culture a été pratiquée, plus les cultures inoculées avec le mélange de propagules vont prospérer. Plus la diversité des mycorhizes se trouvant dans le champ est grande mieux c'est ! Pour cela, il vous suffit de faire tester la terre par un laboratoire.

4 MÉTHODES DE RÉCOLTE DE SPORES FONGIQUES ARBUSCULAIRES SUR LE TERRAIN

Spores prélevées en pleine terre :

- Type de culture : en général une seule espèce

- Taux de réussite : modéré


Spores dans de la terre diluée :

- Type de culture : en général, espèces mélangées

- Taux de réussite : élevé


Fragments de racines de pleine terre :

- Type de culture : espèces simples ou mélangées

- Taux de réussite : élevé


Pousses transplantées :

- Type de culture : souvent une seule espèce

- Taux de réussite : modéré


Faites vos propres expériences pour en tirer vos conclusions, adaptées à votre contexte.

PRODUCTION DE CHAMPIGNONS ECTOMYCORHIZIENS

Les champignons ectomycorhiziens sont relativement faciles à produire à condition de disposer de la plante hôte adéquate.


Des études ont montré qu'un sol contenant des champignons ectomycorhiziens prélevé en forêt à un endroit déterminé, peut être utilisé avec succès pour former des associations avec des arbres hôtes, à un autre endroit.

Les conifères et les feuillus répondent de la même façon à ces méthodes.


Collecter les organes de fructification des champignons ectomycorhiziens pour les utiliser comme propagules. Lorsque les sporocarpes sont matures, il vous suffit de réaliser une empreinte de spore en plaçant une feuille ou une plaque de verre sous le chapeau du champignon identifié, pendant 24h. Les spores vont tombées sur le support choisi et vous pouvez ensuite facilement les récupérer.


Pour établir des colonies ectomycorhiziennes, il suffit :

- d'ajouter les propagules directement à côté des racines de la plante

ou

- de vaporiser les graines des cultures avec des suspensions de spores.

- Pour les petites surfaces, une méthode très simple consiste à couper les organes de fructification en petits morceaux et à les mélanger avec la terre de rempotage ou de transplantation. Quelques spores à peine suffisent à inoculer la terre, et il impossible d'en utiliser trop.

LES LOIS DE LA MYCORHIZE

Les champignons mycorhiziens sont de toute évidence les outils importants et de grande valeur pour n'importe quel cultivateur.

Chaque milieu de culture est différent, les mycorhizes peuvent avoir leurs humeurs et une association mycorhizienne peut réussir en serre et pas en pleine terre. L'expérience, et quelques règles à respecter seront les atouts de toute culture et inoculation.

Associer les champignons et la plante

Les associations mycorhiziennes sont liées à des hôtes spécifiques, même si la plupart des arbres forment des associations avec des champignons ectomycorhiziens, et que les fleurs et arbustes s'associent avec des champignons endomycorhiziens arbusculaires, il y a des variantes.

L'utilisation d'un mélange de différentes espèces de propagules mycorhiziennes se traduit souvent par des meilleurs résultats.

Le choix du système d'inoculation fait la différence, les formulations liquides peuvent être le meilleur système d'application pour des pelouses mais ne sont pas forcément appropriées pour les jeunes pousses issues de graines ou pour les contextes agricoles.


Utiliser des propagules viables

Les propagules comprennent des spores, des fragments d'hyphes et des fragments de racines avec des vésicules.

Les fragments de racines avec des vésicules sont fiables environ 1 an.

Le nombre de propagules viables diminue avec le temps.


Surveiller le phosphore

Si le sol contient trop de phosphore, une plante hôte potentielle ne formera pas de mycorhizes.

Vérifier, grâce à un échantillon envoyé en laboratoire, que les taux de phosphore sont inférieurs à 70 ppm.


Ajouter des propagules dans les mélanges de terre

Ajouter les dans les mélanges de terre, dans les mélanges pour compost, et utiliser cette terre lorsque vous procédez à des transplantations.

Plus il y a de propagules, plus grandes sont les chances que les hyphes fongiques entrent en contact avec les racines.


Inoculer aussi tôt que possible

Donner de l'avance aux plantes pour que les avantages des mycorhizes soient présent immédiatement et de façon continue, depuis la germination.

Pour cela, il suffit de rouler ou vaporiser les graines avec une solution de propagules ou de terre en contenant.


Attention aux biocides

Tous les biocides ont des conséquences à la fois sur les champignons mycorhiziens et sur les organismes du sol.

D'un autre côté, il est surprenant de constater que certains produits de synthèse viennent en aide au développement mycorhizien.


Avoir la main légère

Traiter la vie avec douceur et bienveillance, les champignons sont des organismes fragiles.

Travailler le sol le moins possible pour les fragiliser le moins possible, le retournement, le compactage, réaliser des trous profonds ou surpiétiner sont des actions qui nuisent à la vie et au développement des organismes fongiques et du réseau trophique du sol.


Conserver les propagules

Un niveau de température constant est la condition essentielle pour la conservation des propagules. Les températures optimales pour les maintenir en vie sont comprises entre 24 et 30°C. Les garder dans un endroit sec, frais et exempt de contamination.

Placer le sac dans un bocal hermétique ou dans un pot stérile sans sac.


Rester informer et en lien

Les mycorhizes ont été découvertes il y a plus d'un siècle et pourtant leur potentiel est très méconnu. De nombreux scientifiques et universités publient le fruit de leurs recherches, de façon synthétiques. Se tenir informé des avancées des connaissances ou méthodes d'inoculation est vital pour l'avenir d'une agriculture saine et résiliente. Chaque système installé et inoculé fonctionne comme un réseau, dont chaque cultivateur fait partie.


Faire ses expériences et les partager

Avoir recours aux propagules pour obtenir des mycorhizes est un processus nouveau pour les cultivateurs en général. Cela demande de mobiliser des connaissances issues des expériences de chacun. Chaque tentative d'amélioration des processus, des résultats (qui sont variables) permettent de nourrir la toile des cultivateurs soucieux de maintenir des cultures en bonne santé et capable de répondre favorablement aux enjeux du XXIème siècle.


Il reste tant à découvrir, tant à apprendre, que le partage est essentiel pour faire avancer les pratiques agricole permettant de solidifier la transition dont notre civilisation à besoin d'entreprendre pour sa propre pérennité.


En France, fournisseur de champignons mycorhiziens et laboratoire d'analyses :

INOCULUMplus : www.inoculumplus.eu


2 431 vues0 commentaire

Posts récents

Voir tout
bottom of page