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Les mycorhizes en agriculture - 2 / 2

Lorsque des perturbations du sol détruisent les mycorhizes (labour profond et répétitif, ajout de phytosanitaires, rotation de culture répétée, etc...), les mauvaises herbes viennent concurrencer les cultures pour se fournir en phosphore ; et ainsi le cercle sans fin s'installe. Si les populations mycorhiziennes nécessaires ne sont pas présentes, les cultures peuvent alors souffrir. Comme les fragiles champignons mycorhiziens arbusculaires se trouvent dans la partie supérieure du sol (entre 15 & 38 cm), certaines pratiques peuvent avoir un impact négatif sur l'établissement et le comportement des mycorhizes. Épluchons les ...

CHAMPIGNONS MYCORHIZIENS & LES COMPOSÉS ALLÉLOCHIMIQUES

Certains champignons mycorhiziens sont impacts de manière négative par les composés allélochimiques libérées par certaines plantes. Certains de ces composés peuvent empêcher la germination des champignons et d'autres empêchent la formation des mycorhizes.

Études de cas : dans le Minnesota, des érables, plantés au bord d'un lac, ont disparu à cause de l'introduction d'une espèce non native. Des pêcheurs avaient jeté des vers dans la forêt après avoir passé la journée à pêcher. Or, ces vers n'étaient pas des vers de terre mais des lombrics asiatiques qui détruisent l'humus très, voir trop, rapidement, de sorte que le sol devient nu, laissant toute la place à l'herbe à l'ail (Alliaria petiolata), qui est une invasive, pour se développer. L'herbe à l'ail exsude des composés allélochimiques qui tuent les symbiotes mycorhiziens des érables...

PRATIQUES AGRICOLES À IMPACTS NÉGATIFS

1. Rotation des cultures

La rotation des cultures est une pratique classique et l'on admet que c'est un système efficace pour améliorer et maintenir la fertilité du sol. Néanmoins, le type de culture mis en place peut avoir des effets importants :

- installer des plantes hôtes aptes aux mycorhizes augmente la capacité du sol à établir ou à fixer des champignons mycorhiziens.

Or des études ont également montré que l'inverse est également vrai :

- s'il n'y pas de plantes hôtes disponibles, les champignons ne peuvent pas disposer du carbone dont ils ont besoin pour survivre et donc assurer leurs précieux rôles.


Comme nous l'avons vu, les cultures diffèrent dans leur dépendance aux champignons mycorhiziens arbusculaires. Le maïs, le lin, les légumineuses et les pommes de terre bénéficient de manière significative des mycorhizes arbusculaires, tandis que le blé, l'avoine et l'orge en tirent des bénéfices moindres.

Certaines plantes cultivées comme celles de la famille des Brassicacées, les betteraves et le sarrasin ne forment pas du tout de mycorhizes. Ou encore, dans le cas de la moutarde, du colza et du radis, libèrent des composés chimiques allopathiques quand ils se décomposent qui peuvent empêcher la formation ou la propagation de spores de champignons mycorhiziens arbusculaires (et parfois d'autres plantes).

Ces composés chimiques peuvent rester dans le sol même lorsque les plantes en ont été retirées.


2. Jachère

Laisser un champ en jachère peut réduire la population des champignons mycorhiziens arbusculaires dans le sol, car les plantes hôtes ne sont pas là pour assurer leurs rôles comme fournir le carbone.


Si un champ ne produit pas de cultures, il faut y planter comme couvre-sol une plante hôte qui accueille les mycorhizes.

Si un champ doit rester en jachère au lieu que l'on y plante une culture hôte, il faut l'inoculer avec des champignons mycorhiziens avant la saison de croissance suivante.


3. Altération du sol

Toute altération qui touche les plantes ou le sol en surface, comme le pâturage, le hersage, ou le labourage, peut avoir un impact négatif sur l'environnement végétatif, notamment sur le réseau mycorhizien souterrain.


Les champignons endophytes* qui se trouvent dans les feuilles peuvent être activés et affecter les mycorhizes.


Le labourage détruit souvent les spores ou se retrouvent déplacés vers des horizons plus profonds, où elles risquent de ne plus être suffisamment proches des racines ou des exsudats des racines, ou bien leur germination et leur croissance peuvent être retardées parce que les conditions physiques du sol ne sont pas satisfaisantes.


Si les hyphes sont détruits ou endommagés, ils ne seront pas en mesure d'entrer en symbiose avec des cultures couvre-sol ou des cultures plantées au printemps, et la quantité de phosphore disponible pour la récolte à venir sera détruite jusqu'à ce qu'un nouveau réseau se forme.


*champignon non symbiote, inoffensif, présent dans toute la plante.


4. Emploi de produits phytosanitaires

Certains fongicides, produits inoculants, pesticides fumigènes et fertilisants peuvent détruire ou limiter la formation du réseau de champignons mycorhiziens arbusculaires en affectant certains aspects du réseau trophique du sol dont ils dépendent. Les graines agricoles sont souvent enrobées de fongicides et ces derniers sont aussi souvent utilisés dans les parcelles agricoles.


Or, ces biocides peuvent être mortels pour les champignons mycorhizines arbusculaires, car ils attaquent un composant fongique en particulier : comme leur paroi cellulaire ou leur processus métabolique.


Vaporiser les feuilles des plantes, par exemple, aura un impact nettement moindre que d'imbiber le sol avec un fongicide au moment où les mycorhizes commencent à se former.


Les champignons mycorhiziens sont des êtres vivants et font partie du précieux réseau trophique du sol. Si une plante hôte mycorhizée est tuée à la suite de l'application d'un herbicide, le nombre de spores dans le sol peut être réduit, avec diverses conséquences néfastes.


L'application de certains pesticides peut entraîner une plus forte colonisation par les champignons mycrorhiziens arbusculaires. Les nuisibles étant exterminés, les plantes sont en meilleure santé, peuvent produire davantage d'exsudats, qui attirent et alimentent davantage de champignons.


Néanmoins les solutions organiques sont toujours à préférer aux produits chimiques.


5. Emploi de fertilisants

La quantité de phosphore ou d'azote présente dans le sol peut considérablement affecter la germination et la formation des champignons mycorhiziens arbusculaires. Si l'un ou l'autre de ces nutriments est présent en trop grande quantité dans le sol, les spores mycorhiziennes sont moins aptes à germer et la croissance des mycorhizes est entravée.


Il peut s'écouler des dizaines d'années avant que les niveaux de phosphore diminuent au point que les mycorhizes arbusculaires soient de nouveau en état de se développer favorablement.


Un excès de phosphore peut également être problématique pour les agriculteurs biologiques traditionnels, qui amendent le sol avec du fumier animal contenant de fortes proportions de sels de phosphate, souvent plus de 100 parties / million, proportions qui peut rester dans le sol 100 ans après l'opération !

L'emploi de fertilisants au phosphate, de compost riche en fumier ou directement de fumier, doit être maîtrisé pour obtenir et maintenir les bénéfices optimaux fournis par les mycorhizes arbusculaires.


Les plantes qui bénéficient de mycorhizes arbusculaires poussent souvent 2 à 3 fois plus quand on utilise moins de fertilisants, et les chercheurs ont démontré que les plante augmentent leur consommation en phosphore et en azote lorsque les champignons mycorhiziens arbusculaires sont conservés.


6. Brûlis

Alors que les spores de champignons mycorhiziens arbusculaires peuvent supporter des températures froides, une température excessive (+ de 49°C) les tue ou les endommage. De très bons sols ont pourtant ainsi été créé grâce à cette technique.

Une fois que le champ est brûlé, le peut être inoculé pour réintroduire les populations de champignons mycorhiziens arbusculaires.


Il est à noter que cette pratique permet de reléguer dans l'atmosphère une quantité de carbone qu'il est préférable de conserver dans le sol, plutôt que de participer à l'augmentation du réchauffement climatique.

PRATIQUES AGRICOLES À IMPACTS POSITIFS

Les agriculteurs peuvent avoir recours à des pratiques durables et pérennes pour renforcer les populations natives de champignons mycorhiziens. Même les sols qui ont été travaillés intensivement pendant une longue période contiennent des populations de champignons mycorhiziens qui peuvent être encouragés, en ayant recours à :

1. Amendements organiques et mulch

Des études ont montré que les sols, dans un système agricole aux pratiques organiques, comportent la même colonisation fongique arbusculaire que les terrains aux alentours qui ne sont pas cultivés.


Tous les amendements et mulch organiques fournissent une gamme complète de micro-organismes caractéristiques du réseau trophique du sol, qui décomposent la matière organique et permettent aux champignons mycorhiziens arbusculaires de profiter au mieux de la minéralisation des nutriments.

En effet, les acides des champignons peuvent être directement impliqués dans le processus de décomposition.


2. Introduction de champignons mycorhiziens

De plus en plus d'études montrent quel recours aux mycorhizes est une manière viable et pérenne d'augmenter la production, la résilience de l'agrosystème et que les coûts induits en valent largement la peine.


Le changement peut être lent mais année après année, les résultats sont largement positifs de tests menés à grande échelle encouragent de plus en plus d'agriculteurs à envisager de remplacer les fertilisants chimiques par des champignons mycorhiziens. Sans compter la diminution des coûts que cela permet d'engendrer.


C'est en faisant tester un sol en laboratoire que l'on peut connaître la présence ou non de spores ou de propagules mycorhiziennes, mais aussi le potentiel éventuel offert aux mycorhizes.

Cela est déterminé en prélevant de fines racines, que l'on traite ensuite par une procédure d'éclaircissement et de coloration, afin d'établir le pourcentage de la longueur de racine qui contient des structures mycorhiziennes.


Si les conditions le permettent, les champignons mycorhiziens arbusculaires peuvent être introduits et les racines des plantes colonisées. L'ajout de l'inoculum approprié pour chaque plante peut se faire en utilisant différents systèmes, comme l'irrigation goutte à goutte, l'épandeur de semences, les graines enrobées ou encore la pulvérisation liquide.


Nous aborderons les différentes méthodes dans le post suivant.

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